Le Wing Chun en Chine

Le Wing Chun en Chine

Journal de bord III - Trois ans, putain...

Je ne me souviens pas de tous les jours que j'ai vécu en Chine. Rapidement, l'entraînement devient une routine. Et la routine ne change que par les saisons. En été, on s'entraîne dehors, sous un soleil de plomb. On se baigne dans la rivière et on fait la sieste à l'ombre d'un arbre. L'hiver, on préfère l'intérieur. Le froid est la préoccupation première et un réel défi pour le moral. Mais je ne saurais vous donner de souvenirs exacts, jour après jour.

Par contre, le jour de mon départ, je m'en souviens comme si c'était hier. Chaque détail. Je pourrais le décrire minute par minute. Ce fut pour moi la fin d'une aventure incroyable. Je me rappelle avoir retenu un sanglot en saluant la classe. Je me rappelle de chaque personne m'ayant serré dans ses bras. Du regard du maître. De la sensation de la portière qui se referme sur l'école et de la voiture qui démarre. De l'attente interminable à l'aéroport...


Une fois de retour à Paris, la première chose à m'avoir frappé, c'est l'odeur du métro que j'ai pris pour aller chez mon père. C'était odieux. Une véritable agression. En arrivant à la maison, il me fit m'assoir devant un petit déjeuner. Mon premier petit déjeuner français depuis un an. Et je ne cessais de parler, de raconter, d'exulter... Lui, pragmatique, me demanda ce que je comptais faire à présent. Sans aucune hésitation, je lui répondais : "Y retourner !"


Ce à quoi il répondit : "Et comment comptes-tu faire ?"


A cet instant, je compris que je n'étais pas prêt de repartir. Il allait me falloir un long, très long moment, pour économiser assez d'argent afin de retourner à ce qui était à présent ma réalité. Mon regard retomba sur ma tartine beurrée, et je fus tout à coup beaucoup moins volubile...


C'était en 2012.


Nous sommes en 2015 à présent, et la somme suffisante est en ma possession. Enfin, presque. En effet, mon père a consenti à partager les frais. Non pas sans me faire jurer à de nombreuses reprises qu'après ça, il souhaitait s'investir dans sa propre vie. J'ai été un enfant difficile, marginal, et il n'a eu que peu de temps pour profiter de sa propre vie, si inquiet, souvent à juste titre, au sujet de la mienne.


La première fois que je suis parti, c'était pour fuir ce monde. Fuir Paris, fuir mes peurs, mes responsabilités, la course au fric et aux petits boulots à laquelle je ne m'identifiais pas... Aujourd'hui, j'ai de réels projets, des attentes, de l'espoir. Et paradoxalement, c'est maintenant que j'ai vraiment peur. Parce que les enjeux sont tout autres. Qu'ils sont bien plus grands, bien plus importants. J'ai peur de ne pas réussir. D'aller vers un échec. Mais je ne le saurai que si je pars. Je préfère les remords aux regrets. Cette fois ci, je ne fuis plus. J'ai vais affronter tout ce qui autrefois me paralysait. Ce sera difficile, mais au fond, ce ne serait pas intéressant autrement.


Trois ans, putain... Il en aura fallu du temps. Mais maintenant je suis prêt. Je pars faire face à mon destin.



21/05/2015
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